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LA PULSATILE Pouls de récits fragmentés

Les bonnes vieilles recettes

Nature et Culture
Les bonnes vieilles recettes

Marié, et polygame. Son amour du sexe féminin lui permet beaucoup de libéralités. Jean-Marie Blondieau est un offrant. Il offre des cadeaux, pour celles qui ne sont pas contre s’offrir. D’une jeune donzelle de 18 ans à une grand-mère de 87 ans, du moment que la poitrine imposante se double d’une coquetterie, d’une chevelure bien tenue, d’une jolie tenue accompagnée de jolis petits bijoux en or, le sexe n’a plus de prix. Nadine Turinos fait partie de celles-là, pas Estelle Rosette. Florent Seguin, lui, n’apprécie ni l’une ni l’autre. Il préfère la compagnie des bons copains à celles des bonnes femmes. Et, sans équivoque, ses penchants vont vers ses biquettes. De bonnes petites vieilles biques joueuses et un brin cascadeuses. Le moulin qu’il habite ne lui appartient pas. C’est un héritage de son ex-femme où vivait son ex-belle-mère. Un petit moulin à l’ancienne qui enjambe la rivière. Fait remarquable : les résidus provenant des toilettes se jettent directement dans le cours d’eau. De quoi nourrir les poissons et les quelques écrevisses qui vivent encore près du pont de Saint-Avit-les-Monts, qui jouxte le petit moulin de Florent Seguin. Il n’en est ni le propriétaire ni l’usufruitier, de ce petit moulin qui dispose d’un vaste pré où il s’essaie à la mangrove. Il en est l’indéfectible jouisseur. Il y fait venir ses petites ouailles, ses petits protégés du temps où il dirigeait l’agence du journal local. Des journalistes qui s’embrouillaient, entre un communiste pur jus et une ancienne secrétaire qui s’est piquée de rédaction journalistique particulièrement complaisante avec le pouvoir gaullien en place, et les relents racistes en plus. Il y avait aussi tout ce réseau de correspondants qui, pour certains, rêvaient du Graal : être embauché par le journal en CDD, puis en CDI. Il avait même pris soin, en bon Samaritain, d’utiliser les services d’un aspirant photographe qui n’écrivait qu’en phonétique. Il savait à peine lire et écrire, mais, avec ses photos, ça pouvait faire l’affaire. Il y avait aussi ces petits gars du village qu’il invitait autour d’une bonne table et de beaucoup de bouteilles de bières et de vins qui lui permettaient de refaire le monde du village et de ses alentours. Des petits informateurs en sorte, qui lui ont permis de prendre le pouls régional, lui qui ne sortait jamais de son bureau lorsqu’il était à l’agence. Mou, irrémédiablement mou, et, surtout, très veule. Un homme sympathique en somme, qui avait tissé sa toile et son réseau grâce aux autres. Jean-Marie Blondieau avait bien compris cela, et il était toujours utile d’avoir dans ses rangs des personnes disposant d’un bon répertoire téléphonique. Piqué d’histoire et d’écriture, Florent Seguin écrit, à ses heures perdues ou gagnées sur le terrain, quelques ouvrages qu’il autoédite et s’est récemment mis aux polars locaux et régionaux, s’inspirant, parfois, de quelques personnages qu’il avait invités, jadis, à sa table. Sa vie à lui se jouait entre la jeunesse de ses relations journalistiques et l’âge très mûr voire blet du tissu politique local. Surtout, ne pas trop en dire pour ne pas se nuire et rire volontiers aux facéties rigolardes des uns et des autres. Les aventures féminines de Jean-Marie Blondieau l’amusent beaucoup. Un côté distrayant qui évoque en lui le goût de la conquête par procuration. Lui, il reste désormais sur le trottoir, toujours à mi-chemin entre son moulin, le bar du bourg du Centre et la mairie. Un triangle de deux cents mètres où il s’applique à marcher droit, avec une démarche légèrement chaloupée due à son surpoids. Un triangle stratégique où la rivière a sa place en suivant le cours des petites affaires municipales. Il peut s’impliquer, mais pas trop non plus. Nonchalance et mollesse font de lui les deux mamelles d’une utilité superficielle. Le plus important : siéger dans certaines commissions, dans certains conseils d’administration, au milieu d’écriveurs locaux qui fricotent avec le tissu politique local pour obtenir, parfois, des subventions, et faire vivre une petite culture du terroir.

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