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LA PULSATILE Pouls de récits fragmentés

Nadine et Estelle, les deux mamelles de la mairie

Nature et Culture
Nadine et Estelle, les deux mamelles de la mairie

Depuis quelques temps, Nadine Turinos était l’amante de la mairie. Elle fait le lien entre Jean-Marie Blondieau et le personnel municipal, bien qu’il ait toujours établi des relations cordiales avec les secrétaires de mairie, et des relations amicales avec le personnel des services techniques avec lequel il se retrouvait fréquemment autour d’un kir au bar du bourg du Centre. Nadine Turinos s’occupe du personnel féminin, des secrétaires et des femmes de ménage. Elle est en charge des seniors et du Centre communal d’action sociale. Le social, c’est une charge qu’elle a acceptée à la demande de Jean-Marie Blondieau lorsqu’il l’a recrutée pour faire partie de son équipe municipale. Femme de militaire, elle a dû abandonner son précédent poste de secrétaire dans l’armée de l’air pour suivre son mari en terre avitienne. Pour elle, pas de poste à la base. Son époux, officier et mécanicien spécialisé dans l’aviation, faisait partie des effectifs de l’armée. Elle non. Elle était contractuelle et personne ne l’attendait à la base aérienne. Dès qu’elle et son mari Lionel se sont installés face à la mairie de Saint-Avit-les-Monts, après deux années passées au Congo, près de Brazzaville, elle n’était pas immédiatement entrée dans la maison commune pour se présenter. Les connaissances se sont fait au fur et à mesure des problématiques posées par l’installation du couple. Solide et organisée, Nadine est une femme habile de ses mains, des petites mains potelées qui, parfois, savent encore taper sur le clavier d’un ordinateur. Dès son entrée dans la vie municipale, elle avait tout de suite organisé sa politique, sous la férule de Jean-Marie Blondieau. Elle a su immédiatement diriger les dames qui siégeaient au CCAS, avait pris en main le petit local qui servait de bibliothèque et mettait la main à la pâte dès qu’il fallait organiser une festivité. Elle avait plus ou moins été introduite auprès de Jean-Marie Blondieau par une voisine, Estelle Rosette, conseillère municipale dans un premier mandat et fille d’une des femmes de ménage de la commune. Estelle Rosette est elle aussi peu bavarde et elle sait également prendre en main quelques petites affaires qu’on lui confie volontiers. Lors des conseils municipaux, elle est l’éternelle volontaire désignée secrétaire de séance. Une fonction qui se réduit à peu de choses tant les compte-rendus sont succincts et abscons. Car, comme le répète si souvent Jean-Marie Blondieau, « à Saint-Avit-les-Monts, on est transparents ». De cette tâche, elle s’occupait de bonne grâce. Secrétaire dans l’âme, il faut dire qu’il n’y avait pas grand-chose à faire. A chaque conseil municipal, on lisait le procès-verbal du conseil précédent. Et il faut bien le dire, cela ne prenait pas beaucoup de temps et, de facto, jamais d’observations ni d’objections sur ce qui s’est délibéré auparavant. En somme, tout le monde était toujours d’accord. Pas d’objections, pas d’interjections, les décisions antérieures sont définitivement entérinées et, envoyées, bien entendu, en préfecture. Nadine Turinos et Estelle Rosette ne forment pas vraiment une équipe. Chacune agit dans son coin. Il y a l’officielle, celle qui travaille avec les employées municipales, et la moins officielle, qui fait ce qu’elle peut. On ne peut pas dire qu’Estelle Rosette ait un physique avantageux. Son obésité lui vaut quelques problèmes de santé, et ses jambes ont dû mal à la porter. Bon an mal an, elle avance. A petits pas, mais lourds et fortement cadencés. Jean-Marie Blondieau a un peu d’affection pour elle. Il la connaît depuis qu’elle est toute petite, car elle aussi est une enfant du pays et, de surcroît, sa mère a fait le ménage dans les salles de la commune. Sans la soutenir, mais lui accorder le rôle de secrétaire de séance lors des conseils municipaux lui donne une certaine responsabilité. C’est aussi se donner l’assurance que rien d’important ne transparaîtra jamais. Uniquement le superflu, l’essentiel est décidé en commissions. Pas de réelle rivalité entre Nadine Turinos et Estelle Rosette. Chacune a trouvé la place qu’on lui a donnée, et c’est ainsi que les affaires continuent de tourner. Quelques points communs, et du surplus mammaire… Ce qui n’est pas négligeable non plus pour certains amateurs de bonnet F à G. Dont Jean-Marie Blondieau, qui est plus feu que bois pour ces choses là. Entre ces discrètes et besogneuses élues, pas de mésentente ni de mésalliance. Elles se connaissent sans se reconnaître pour autant. Chacune a ses tâches, qui se croisent parfois et même souvent, mais chacune sait où sont posées les limites, grâce à Jean-Marie Blondieau qui affiche très nettement sa préférence pour Nadine, plus coquette et dont les atouts féminins l’attirent davantage. Elle se soumet, mais n’est pas pour autant soumise. Elle aussi peut afficher ses quatre volontés, mais elles sont susurrées de sa voix douce et légèrement traînante. Pour autant, Estelle Rosette veille quand même au grain grâce au petit grain de sel que sa fonction lui permet. Et sa famille aussi, qui est bien ancrée à Saint-Avit-les-Monts depuis quelques générations. Une grande famille de neuf enfants, vingt-cinq petits enfants et on ne compte plus les arrière. Estelle, elle, était la huitième. Pas la dernière, mais ses neveux et ses nièces ont été baptisés lorsqu’elle a fait sa première communion. Une grande famille donc, quelques frères et surtout beaucoup de sœurs qui se sont mariées et qui sont restées à Saint-Avit-les-Monts, et qui, elles aussi, ont fait quelques filles. Des Rosette qui changent de nom, à l’exception d’Estelle qui vit, elle, dans un pêché qui n’est plus mortel avec son mari qui n’en est pas un puisqu’ils ne sont passés ni devant le maire, ni devant le curé. Estelle vit avec un autre petit gars du coin, connu à l’école du village à l’heure où les classes étaient devenues mixtes. Deux vieilles familles avitiennes réunies pour former une nouvelle famille, dans la besogne et avec l’assentiment de monsieur le maire qui permet à Nicolas Coquillard de continuer à travailler dans le village, et aussi dans les communes avoisinantes. Vivre dans l’artère principale de Saint-Avit-les-Monts, à deux pas de la mairie et dans l’axe de la zone commerciale a quelques avantages, malgré le balai incessant des véhicules qui perturbe la quiétude des vieux riverains qui, eux, ont connu une route principale à l’heure où elle n’étais pas encore bitumée et où les chevaux n’étaient pas encore dans le moteur. Nadine, Estelle, Estelle, Nadine, les deux ne faisaient pas pour autant la paire puisqu’elles agissent en toute indépendance, presque en solitaire, mais avec l’accord du maire. Nadine Turinos a toujours plu à Jean-Marie Blondieau, qui aime s’attaquer à plus imposant que lui. Marié, père de deux garçons qui ont repris sa petite grande affaire. Rex Isol perdure, grâce aux marchés publics. Quelques conseillers municipaux ont pu aussi bénéficier de l’expertise de Rex Isol en matière d’isolation puisque certains d’entre eux ont profité d’être en lien avec Jean-Marie Blondieau pour faire isoler leur petit ou grand pavillon. Au prix d’un prix d’ami, bien entendu, pour une maison repeinte et proprette, qui ne laisse pas s’échapper les kilowattheures de leur chauffage à l’extérieur. A Saint-Avit-les-Monts, on a vu quelques panneaux Rex Isol fleurir ici ou là, posées sur les clôtures des habitations rénovées grâce à l’expertise de l’entreprise. Estelle Rosette n’en a jamais eu besoin, son compagnon est maçon. Ce qui n’est pas le cas de Nadine Turinos, dont la longère a partiellement été rénovée par la petite grande société des fils de Jean-Marie Blondieau qui, une fois à la retraite, se rendait souvent dans les locaux de l’entreprise pour s’y servir en seaux de peinture qui pouvaient être utiles à un copain ou une quelconque relation.

 

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