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LA PULSATILE Pouls de récits fragmentés

Des étiquetés sans étiquette

Nature et Culture
Des étiquetés sans étiquette

Le petit moulin à eau de Florent Seguin n’a plus sa fonction originelle depuis le début du 20ème siècle. C’est un petit endroit charmant, un peu romantique avec ses volets gris-bleutés, sa petite roue qui ne sert plus à rien depuis la fin des petites minoteries, mais dont le propriétaire sait toujours transformer le blé en farine plus ou moins grossière. Cela datait du temps des scoops et des concurrences de deux titres de la presse régionale qui désormais n’en font plus qu’un, puisque appartenant au même groupe. Florent Seguin a profité de ce rapprochement pour se mettre en retraite et profiter d’une clause de cession qui lui permet de mener une jolie petite vie sans trop de soucis matériels. Reste le prix du livre qu’il faut faire éditer, et vendre au bar du bourg-du-Centre ou dans la galerie marchande de Monclair. Écrivain, et local, bien qu’étant un joyeux accouru qui a su se mettre au diapason des petits gars du pays, en vivant plus ou moins sur le même tempo idéologique, mais pas au même rythme. Sa petite roue ne tourne plus, mais l’eau continue à filer dans un léger bouillonnement. Une certaine idée de la vie en milieu semi-rural pourvu qu’il ne fasse pas de vagues et qu’il vive selon des convictions qui fluctuent. « De toute façon, il ne sait même pas où il est né », dit de lui souvent Jean-Marie Blondieau, qui n’avait aucun doute sur son lieu de naissance. Déjà biberonné à l’alcool dans le ventre de sa mère, c’est dans la même lignée qu’il a conduit ses affaires, autour d’un bon pot, et surtout d’un bon pot de vin. Pour Saint-Avit-les-Monts, il en était de même, et ce dès ses premières classes municipales, bien qu’il apparaissait, déjà, pour le maire de l’époque, comme une espèce de trublion qui n’y connaissait pas grand-chose. Jean-Marie Blondieau est devenu maire de Saint-Avit-les-Monts par défaut, faute d’autres candidats qui aurait voulu de cette responsabilité, d’autant plus que les espaces de Monclair continuaient toujours à prospérer et ne demandaient qu’à gagner du terrain, rasant une usine désaffectée pour y ouvrir un retail park, comme on dit chez les Américains. Ainsi, les habitants de la région pouvaient continuer à se désintéresser des commerces de centres-villes pour rentrer de plain pied dans ces temples de la consommation, comme une ère de foi consommatrice qui consumait totalement leur porte-monnaie. Avant, on donnait son argent à l’Église et au seigneur du village. Désormais, les grands groupes commerciaux se paient en nature grâce aux modes de production des autres. Mais à Saint-Avit-les-Monts, il n’y a pas que Monclair. Il y a aussi l’école, nouveau lieu de culte de cette équipe municipale passée par l’école républicaine. Rien n’est jamais trop beau pour satisfaire les enseignants, faciliter leur travail et permettre aux enfants d’assimiler les leçons dans de bonnes conditions, loin des instituteurs et des parents d’élèves socialo-communistes qui sévissaient dans les années 70 et au début des années 80. Car désormais, tout le monde est sans étiquette à Saint-Avit-les-Monts. On n’affiche pas sa couleur politique pour éviter de froisser certaines sensibilités, surtout les plus âgées, et pour ne pas afficher une couleur trop extrême et radicale. Pourtant, dans certains conseils municipaux, les questions du social et des subventions aux associations étaient largement discutées pour quelques euros d’investissements et de dépenses. Pour d’autres infrastructures, pas forcément indispensables ou bien pensées, on pouvait dépenser sans compter. Outre l’école, il y a le basket et le foot, les deux sports leader et fondateurs de la commune. De bonnes équipes de jeunes et moins jeunes volontaires et passionnés encadrées par des entraîneurs qui ne comptaient pas leur temps pour certains. Surtout pour le foot, la troisième mi-temps, parfois, c’est sacré chez les seniors. Le basket, c’est Christine Prouteau qui le supervise depuis de nombreuses années. C’est pour cette raison notamment qu’elle a été enrôlée dans l’équipe municipale. Ancienne mère d’élèves et présidente du club de basket, elle est aussi la fille d’un passionné de football dont les grands-parents avaient donné leur nom à un stade de la capitale de cette région perdue au sud du département, comprise entre une ligne TGV qui ne s’arrête jamais et une base aérienne de plus en plus désaffectée. Contrairement à Aurelcastel, Saint-Avit-les-Monts ne connaissait pas de crise majeure et pouvait dire merci à Monclair et à son emprise foncière commerciale. La salle de basket était satisfaisante, le stade de foot, ses vestiaires et ses abords étaient toujours bien entretenus, l’église était pimpante et Jean-Marie Blondieau s’est attaché récemment à ce que la salle polyvalente, qui date des années 80, corresponde aux nouvelles normes environnementales en matière d’isolation, et notamment phonique. Près de l’église, de l’ancien presbytère devenu point postal communal et centre de la police municipale, l’espace de la Source est situé à côté de la rivière, avec son parking en calcaire et ses abords herbeux où les cygnes viennent se poser de temps à autres. Car de tous temps, les cygnes ont été la marque de fabrique de Saint-Avit-les-Monts, et nagent sur le logo qui figure dans le bulletin municipal et sur le site internet. C’était bien la preuve que Saint-Avit-les-Monts n’était pas un vilain petit canard, mais un cygne majestueux qui vogue sur les eaux claires de la rivière pour y plonger de temps à autre son long cou à la recherche d’un poisson pour se nourrir. Florent Seguin aime bien les petits gardons dont on peut faire de la friture. Pas pêcheur ni chasseur juste cueilleur, il récolte les fruits de ce qu’il sème dans le sens du vent. Le bourg de Saint-Avit-les-Monts avait la faveur des badauds charmés par ce bâti, ancien, qui portait la marque de fabrique du bâti de la région, avec ses petites briques rouges qui entourent fenêtres et portes d’entrée. Un bourg plein de charme, et quelques jolis chemins où l’on peut randonner au milieu de la nature, loin des services commerciaux de Monclair.

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